I ni sogoma !
Nous sommes samedi matin. Il est tôt. Vous êtes probablement tous couchés dans vos lits douillets et chauds. Je n’ai que quelques heures de sommeil dans le corps alors je remédie avec le nescafé instantané auquel je me suis habituée. N’est-ce pas une véritable tragédie ? La petite princesse italiano-québécoise d’Ahunstic qui doit se résoudre à l’instant ! Oh que je m’ennuie de ma machine à capuccino, du sifflement de la vapeur qui s’échappe, de l’arôme du café brûlant, de la mousse voluptueuse du lait qui, permettez-moi de le souligner, a la particularité remarquable de ne pas être en poudre !
Ce matin, 7h30am précisément, ma mère d’accueil a décidé qu’elle accomplissait ses besognes de bonne femme au rythme vigoureux des chants d’une griotte. Je me suis évidemment réveillée en sursaut et en prime, plutôt que d’être enveloppée dans une couette de duvet moelleuse, j’étais entortillée dans mon moustiquaire comme une abeille dans une toile d’araignée. Que du plaisir ce matin… j’en suis à ma 4ième tasse.
Bon, j’arrête de me lamenter et je mets mes petits caprices de côté. Après tout, j’ai peut-être perdu certains privilèges, mais j’en ai aussi gagné quelques-uns. J’ai tout de même une bonne à mon service presque 24h sur 24. Elle m’apporte le petit-déjeuner au lit, fait mon lavage quand je n’ai pas le temps, attrape mes sacs à mon retour du travail… En échange, je la fais pouffer de rire avec mon bambara approximatif et je m’occupe de la petite Fatimata pour la libérer un peu. Elle grandi à vue d’oeil cette petite merveille. Elle a deux petites dents qui lui sont apparues et ses yeux s’illuminent à la moindre attention qu’on lui accorde. Puisqu’elle porte le nom de sa grand-mère, on la surnomme « la vieille » ou simplement « la …». Ce n’est pas très mignon, je vous l’accorde, mais ce surnom est très courant ici. J’essaie désespérément de lui apprendre à dire « tanti Kadi », mais je n’ai eu aucun succès jusqu’à maintenant. La vieille charme tous les gens qu’elle rencontre et adore la caméra. Je crois que je commence à déteindre sur elle… ;0)
Ici, les journées et les soirées passent à une vitesse saisissante. Mes journées de travail sont bien remplies et je profite pleinement de la ville à chaque occasion qui se présente. La semaine passée, je suis allée voir l’icône de la musique malienne, le fameux Salif Keita, en show au palais de la culture. Le spectacle était fascinant ! Salif a une prestance incroyable sur scène et il y avait des danseurs à moitié nus qui faisaient une espèce de danse du feu… vous avez manqué un bon show les filles ! ;-)
Comme toutes les prestations musicales, celle-ci a commencé avec 4 heures de retard. Au moins, le spectacle se tenait en bordure du fleuve Niger, qui nous dévoilait la ville dans toute sa splendeur. Nous en avons aussi profité pour savourer de la Castel, une bière locale…hehe… Que voulez-vous ? Il faut trouver des moyens pour se distraire puisque ici, on ne peut pas se laisser emporter pour un petit retard de quelques heures. Comme le dirait mon patron Omar, la conception africaine du temps est relative dans une perspective horizontalo-verticale !
À part ma petite nostalgie de caféine et mes petites soirées animées, je reviens d’un petit voyage à Zantiébougou. J’y ai passé la semaine en compagnie de deux photographes maliennes, Bintou et Salimata, que j’ai rencontrées au Centre de formation photographique de Bamako. Au courant de la semaine, elles m’ont attribué le surnom de « grande sœur » et sont alors devenues mes petites sœurs ! Les Maliens ont cette capacité surprenante de développer une familiarité spontanée avec de nouvelles connaissances sans la moindre gêne ou prétention. Il est alors très facile de tisser des liens avec eux. Au début, cela me semblait un peu superficiel, et c’est peut-être le cas, mais pour les étrangers qui veulent s’intégrer et faire de nouvelles rencontres, c’est l’idéal ! Je me souviens la première fois que j’ai rencontré Fanta, elle m’a appelé après 2 jours pour me dire qu’elle s’ennuyait de moi ! J’étais un peu surprise, mais ça m’a tout de même fait plaisir.
Comme dans toute bonne chose, il y a un côté plus obscur à cette affectuosité. Les Maliens, paraît-il, tombent en amour dans le temps de le dire. On peut dire qu’ils n’ont pas vraiment la même conception de l’amour que nous ! Lorsque Marie-Pierre est sortie 2 fois avec un gars et qu’elle a refusé la 3ième invitation, le gars était complètement bouleversé et lui a avoué son amour éternel pour elle ! En tant que québécoise affirmée, elle n’en cru rien, évidemment ! Mais Omar lui a expliqué qu’il était fort probable que la peine du gars soit sincère et que les sentiments amoureux naissent dans cette précipitation ici. Santo cielo …
Bon je dérape un peu là, revenons à mon expo… Bintou, Sali et moi avons fait un reportage photographique sur la production du beurre de karité. Pour ceux qui ne le savaient pas, j’organise une expo pour faire la promotion de la coopérative pour laquelle je travaille. Plus particulièrement, le but de l’événement est de promouvoir le beurre de karité en tant que patrimoine culturel et de valoriser le travail des productrices. Ces dernières étaient vraiment excitées et enjouées de se faire photographier. J’ai très hâte de voir leur réaction lorsqu’elles verront les photos en grands format exposées devant des centaines de personnes.
Durant la semaine, j’ai d’ailleurs participé à la production du beurre. C’était une expérience inoubliable. Les femmes étaient toutes ébahies de me voir accomplir leurs tâches quotidiennes. Il est très difficile d’évaluer leur âge puisqu’elles n’ont presque pas de dents et qu’elles sont plutôt ridées par le dur labeur, mais je dirais qu’elles ont entre 35 et 50 ans. Elles sont toutes analphabètes et travaillent du matin jusqu’au soir. Puisqu’elles viennent des villages voisins et qu’elles n’ont pas de moyens de transport, elles dorment à la coopérative. Le premier soir, Bintou et Sali m’ont informé qu’elles dormaient par terre dans une salle de conférence. Nous leurs avons alors donné deux matelas qui étaient de surplus dans notre appartement. Les femmes nous ont alors couvertes de bénédictions… elles étaient très reconnaissantes.
Je dois vous quitter, je pars à la piscine !
mardi 22 janvier 2008
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